Israël : État né d’une promesse divine et d’un chaos mondial

Par Bernadin Philogène
Derrière les bombes, les murs, les prières et les discours, Israël reste avant tout une énigme historique : celle d’un peuple dispersé revenu à sa terre, au prix d’un autre peuple déplacé. Une nation née d’une promesse divine… et d’un chaos mondial.

Au Cœur du Monde

Par Bernadin Philogène | Édité par Sylvestre Fils Dorcilus

Il est des nations qui naissent d’un Traité. D’autres d’une guerre. Israël, lui, est né d’un texte sacré, d’un espoir inextinguible et d’un siècle de bouleversements mondiaux. Son existence mêle mystique, mémoire et lutte, est une trajectoire unique dans l’histoire des peuples.


Une promesse millénaire gravée dans les écritures


L’origine du nom « Israël » remonte à la Genèse. Jacob, fils d’Isaac et petit-fils d’Abraham, reçoit ce nom après avoir « lutté avec Dieu ». Ses douze fils deviennent les patriarches des douze tribus d’Israël. Très tôt, les textes bibliques évoquent une « terre promise » – un territoire désigné par Dieu lui-même pour le peuple hébreu, situé entre la mer Méditerranée et le fleuve Jourdain.


Cette dimension spirituelle façonne durablement l’identité juive. Même après la destruction du premier temple de Jérusalem (586 av. J.-C.) par les Babyloniens, puis du second par les Romains (70 ap. J.-C.). Les exilés n’oublient jamais leur attachement à cette terre. À chaque Pâques, la phrase « L’an prochain à Jérusalem » symbolise ce lien irrationnel, presque sacré, avec un sol quitté depuis des siècles mais jamais abandonné.


Un royaume disparu, une mémoire intacte


Historiquement, le royaume d’Israël fut l’un des premiers États structurés de l’Antiquité dans cette région. Fondé autour de -1000 av. J.-C. sous les rois Saül, David puis Salomon, il se divisa rapidement en deux entités : Israël au nord et Juda au sud. Conquis successivement par les empires assyrien, babylonien, perse, grec et romain, le peuple hébreu connaît de nombreuses vagues de diaspora.


Malgré l’éclatement, les traditions, la langue hébraïque et la mémoire historique survivent. La dispersion n’efface pas l’identité. Elle la consolide, parfois dans la douleur, souvent dans l’attente. C’est ce long exil, cette survivance obstinée, qui préfigurent un retour. Mais il faudra un monde moderne pour que ce retour prenne une forme politique.


Le sionisme, la Shoah et la naissance d’un État


À la fin du XIXe siècle, les pogroms en Europe de l’Est et la montée de l’antisémitisme en Europe centrale poussent les Juifs à chercher une solution durable. Theodor Herzl, journaliste austro-hongrois, propose en 1896 dans L’État juif une idée révolutionnaire : créer un foyer national juif en Palestine, alors sous domination ottomane.


Le rêve sioniste prend forme. Des vagues d’immigration juive commencent à s’installer en Palestine dès les années 1880. Après la première guerre mondiale, la Déclaration Balfour de 1917 confirme le soutien britannique à ce projet. Mais ce n’est qu’après la seconde guerre mondiale et, surtout, après l’horreur de la Shoah – six millions de Juifs exterminés par les nazis – que la communauté internationale reconnaît la légitimité d’un État juif.


Le 14 mai 1948, David Ben Gourion proclame la naissance de l’État d’Israël. Moins de 24 heures plus tard, cinq pays arabes déclarent la guerre à ce nouvel État. Ce conflit marque le début d’une longue série d’affrontements qui, aujourd’hui encore, n’ont pas trouvé de solution durable.


Entre légitimité historique et controverse permanente


Depuis sa création, Israël vit dans une tension permanente. Perçu par ses fondateurs comme un refuge, un miracle même, il est vu par les Palestiniens comme la cause de leur Nakba – leur « catastrophe » – marquée par l’exode de 700 000 d’entre eux en 1948. Le territoire est devenu un champ de mémoire disputé, un carrefour de douleurs, un terrain d’idéologie et de foi.


Israël s’est pourtant imposé comme une puissance technologique et militaire souvent au prix d’une vigilance extrême. Son existence continue d’être au centre de débats mondiaux : entre droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, revendications territoriales, droit au retour, sécurité nationale, et aspiration à la paix.


Une terre entre promesse, tragédie et résilience


Israël est aujourd’hui l’un des États les plus controversés et les plus surveillés de la planète. Sa création a bouleversé l’ordre du Moyen-Orient. Son avenir reste lié à une équation quasi impossible : concilier les promesses bibliques, les blessures du passé, les réalités géopolitiques et les espoirs d’une cohabitation pacifique avec ses voisins, en particulier les Palestiniens.


Derrière les bombes, les murs, les prières et les discours, Israël reste avant tout une énigme historique : celle d’un peuple dispersé revenu à sa terre, au prix d’un autre peuple déplacé. Une nation née d’une promesse divine… et d’un chaos mondial.-Fin-

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